Vieillerie
J'aime beaucoup les vieilleries, ces objets qui ont vécu. J'imagine leur histoire, la vie qui s'est déroulée autour d'eux.
J'ai bien sûr une prédilection pour les vieux objets de famille. Ce n'est pas leur valeur marchande qui m'attire, mais une autre, bien plus importante, et qui ne se mesure pas : La valeur sentimentale.
Regarder la vieille cafetière émaillée qui trône sur mon buffet me renvoie à une période que je n'ai pas connue, mais dont ma grand-mère m'a souvent parlée. C'était la cafetière de ses beaux-parents.
Chaque jour, elle offrait le café à toute la famille, avant de rejoindre une niche creusée dans le mur, au-dessus du fourneau.
Je n'ai pas besoin de beaucoup d'imagination; il suffit que je ferme les yeux pour me trouver plus de 80 ans en arrière.
J'ai l'impression d'être au milieu d'eux et en même temps en retrait, un peu comme dans les films où les gens sont renvoyés des années en arrière, dans le passé. Sensation étrange, mais fascinante. Je deviens spectatrice de leur vie. Je vois se mouvoir des personnes que j'ai souvent regardées, figées sur de vielles photos jaunies. J'entends le rire de l'oncle Maurice, la voix de stentor de son père, l'oncle Paul qui s'amuse comme un gamin sur une balançoire, les poules qui volètent devant la porte de la ferme.
Je vois mon arrière-grand-mère, que je n'ai jamais connue, se saisir de la cafetière en posant sa main sur le filtre pour le maintenir en place. D'ailleurs, la peinture du couvercle s'est écaillée à cet endroit, sous son geste, maintes fois répétés.
Mon regard quitte l'objet et, telle la lampe d'Aladin, les personnages retournent dans leur passé, ne demandant qu'un coup de chiffon pour m'emmener à nouveau avec eux.
Syl